Exister, résister

de Pascal Chabot,

Cet essai philosophique de Pascal Chabot m'a beaucoup apporté; je l'ai lu lentement, dictionnaire à portée de mains (mes études philosophiques sont loin et le vocabulaire m'échappait souvent). 

Par-delà le résumé assez clair de la quatrième de couverture pour l'idée générale :

« Exister dans le système, c’est souvent être assis derrière des vitres, face à un écran. » Des forces nouvelles, mixtes de technique, d’économique et de numérique, ont fait irruption au sein du technocapitalisme mondial. Nous assistons aux premiers effets de ce qu’il faut bien appeler des « ultraforces » qui, en créant un nouveau monde, déstabilisent les systèmes et fragilisent les existences. Dans ce contexte, nous devenons multiples, éclatés, parfois écartelés. En nous coexistent trois visages : un moi cherchant sa place dans un système constitué de vitres protectrices et d’écrans ; un sujet clivé par les ultraforces d’une mondialisation qui crée autant qu’elle détruit ; et enfin un soi précieux marqué par la saveur d’exister, la recherche d’équilibre et le goût des autres. Comment inventer une convergence entre ces trois facettes de nous-même ? Comment sortir du dualisme appauvrissant qui résulte de la surenchère entre systèmes fragilisés et ultraforces décomplexées ? Cela ressemble à la fin d’une ère. Peut-être le moment est-il venu de préparer la transition vers un monde où la culture de soi et le sens des autres deviendraient centraux ?

Ce que j'ai aimé, ce sont les constants appuis sur la philosophie traditionnelle : Pascal, Nietzsche , Freud mais aussi les références aux poètes, Baudelaire, Rimbaud ou aux analyses de Simone de Beauvoir sur l 'Iliade...En gros donc une narration assez large me changeant des registres traditionnels.

Quelques extraits ci-dessous pour mieux en exprimer le suc:

Il y a dans la rose, dans l'amertume d'une bière, dans une caresse ou dans l'humour d'un ami une profondeur gratuite qui n'appelle pas de justifications. [...] Les seules religions philosophiquement compréhensibles [...] sont les religions de la saveur du monde..

Nous sommes plus hantés qu'on le dit. Et pourquoi les deuils devraient-ils être absolus ? Pourquoi faudrait-il ajouter l'oubli définitif à la perte physique ?

L'homme n'a pas (Nietzsche)sept peaux comme le lièvre.Il en a soixante-dix-sept fois sept, et chaque fois qu'il veut mieux se connaître, il tombe sur une nouvelle énigme [...]

J'ai donc tiré un grand plaisir de cet ouvrage assez ardu que je recommande aux lecteurs penseurs.